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Le dhikr : Un mode de vie

Category : Spiritualité
Date : mars 10, 2025

(…) La remise en cause du récit sioniste ne trouvera évidemment aucune place dans l’espace médiatique qui a fait de la version israélienne des faits une vérité par défaut. La propagande d’Israël, digne des plus grands maîtres de l’illusion,  est parvenue à faire disparaître cent ans de nettoyage ethnique derrière l’opération du 7 octobre. La vérité historique importait peu par rapport à la nécessité de trouver une justification morale à la « riposte » violente de l’État d’Israël. Le Hamas a été ainsi accusé des pires atrocités, dont la supposée décapitation des bébés, « information » par la suite démentie notamment par le journal Haaretz[1]. Il s’agissait d’une pure invention sortie tout droit du cerveau malade des propagandistes israéliens que Joe Biden n’a pas hésité à reprendre à son compte sans la moindre preuve. Israël a très tôt développé une stratégie efficace d’endoctrinement et de manipulation de l’information au service de son programme de nettoyage ethnique. Il a par exemple lancé un programme de bourse offerte aux jeunes citoyens juifs vivant à l’extérieur de l’ « État » hébreu pour faire du lobbying dans leurs réseaux respectifs. En effet, une puissante organisation, connue sous le nom d’AIPAC (American Israel Public Affairs Committee), a vu le jour aux États-Unis en 1943 avec pour rôle de veiller à ce que les élus américains votent dans le sens des intérêts israéliens.[2] Que ce soit aux États-Unis ou en Europe, le lobby sioniste influence très clairement les politiques publiques en faveur des prérogatives d’Israël.

      C’est un fait établi qui pourrait difficilement relever d’une théorie du complot. À ce propos, l’accusation de complotisme est devenue un instrument efficace de disqualification de la pensée critique. C’est un moyen facile pour discréditer un discours non conventionnel et éviter un débat dérangeant. Toute remise en cause d’un pouvoir, d’un système ou d’une élite ne relève pas nécessairement du complotisme. Notons que le complotisme est une attitude psychologique qui prédispose à une certaine rigidité intellectuelle interdisant toute lecture complexe et nuancée du monde. La disposition mentale d’un complotiste le pousse à enfermer le monde dans une structure univoque qui lui donne à voir une masse d’individus vulnérables, manipulée par une force obscure qui conspire en vue de modeler le monde selon son dessein. À ce titre, la caractérisation systématique des musulmans et la critique de l’islamisme sous couvert de « lutte contre le terrorisme » ne sont-elles pas le fruit d’une vision complotiste qui entretient l’idée selon laquelle les « islamistes » fomentent secrètement un projet de domination sur la base de la Sharî’a ? Une telle perception biaisée et simpliste de la réalité ne relève-t-elle pas d’une dissonance cognitive chez les adeptes du « choc des civilisations », notamment lorsqu’ils reprennent à leur compte le concept théologique de « taqiyya » (dissimulation, prudence) pour justifier fallacieusement leur méfiance à l’égard de l’islam. N’est-ce pas une telle vision qui sous-tend d’une certaine façon l’hostilité occidentale envers l’islam ?

    Précisons en premier lieu que le terme de taqiyya en islam relève d’une nécessité pragmatique permettant à un croyant de dissimuler sa foi face à une menace grave comme la torture. C’est, plus précisément, un moyen de survie individuel en contexte de persécutions qui appelle à la prudence et non pas une ruse collective ou un outil politique pour dissimuler une volonté de conquête. L’extrapolation abusive qu’en font les adversaires de l’islam relève d’une lecture complotiste ayant des conséquences désastreuses dans le monde. Par ailleurs, l’uniformisation du monde sur la base d’une idéologie hégémonique ne participe pas de la vision islamique pour laquelle la diversité des cultures et des idées ne représente pas une menace ; bien au contraire, elle constitue un signe de la Beauté divine sur terre, dont elle doit être garante dans le modèle de vivre-ensemble qu’elle défend. Le Coran rappelle en ce sens : « Et parmi Ses signes : la création des cieux et de la terre, la diversité de vos langues et de vos couleurs. En cela, il y a bien des signes pour ceux qui savent. »[3]

     La déconstruction de la fiction médiatique en faveur d’Israël, échafaudée sur la base d’une manipulation des faits et des images, est d’utilité publique. Surtout lorsque cette fiction a le terrible pouvoir, pour paraphraser Malcom X, d’inverser les rôles, en faisant passer le démon pour l’ange et l’ange pour le démon.[4] Déconstruire consiste avant tout à redéfinir les termes et les concepts qui travaillent une question afin de reconstituer les faits dans le sens de la vérité. Appliquer les concepts adéquats à une réalité est une façon de la maitriser et c’est la première faculté dont fut dotée Adam « Et Il (Dieu) enseigna à Âdam le nom de chaque chose »,[5] autrement dit, Il lui enseigna l’art de nommer la réalité qu’il s’apprêtait à transformer. La transformation du monde passe par un exercice rigoureux de nomination, de conceptualisation et de définition des problèmes qui l’affectent. Car définir un problème c’est le dominer. L’impérialisme occidental a contrôlé le monde musulman parce qu’il a su le définir en lui appliquant ses propres catégories anthropologiques, comme « peuples primitifs », « sociétés archaïques » etc. En définissant les sociétés musulmanes selon son propre lexique, le pouvoir colonial a créé les dispositions mentales de leur impuissance et a pu ainsi asseoir son hégémonie culturelle. Les peuples colonisés ont commis l’erreur d’intérioriser ces concepts, autrement dit, de se définir sous le prisme des catégories colonialistes. Ainsi, en se posant en objet d’étude coloniale, ils ont cessé d’être sujets de leur histoire.

     Pour empêcher la force occupante d’imposer son référentiel colonialiste dans le débat qu’elle cherche à dominer sur la question palestinienne, il faut mener la lutte sur le plan terminologique. Il s’agit de rappeler aux promoteurs d’opinions sionistes le sens des mots qui dépassent leur intelligence, et surtout le sens de l’Histoire qui semble leur avoir échappé. Il est question, en d’autres termes, de se réapproprier un vocabulaire confisqué par la classe dominante, afin d’exposer une vision du réel, un récit, qui remet radicalement en cause celle que tente d’imposer les médias de masse dans l’opinion publique. Le principal acte de résistance à notre échelle consiste, de manière plus explicite, à décoloniser l’information en neutralisant la charge idéologique de la terminologie qui est principalement à l’œuvre dans cette guerre des mots et des images autour de la question palestinienne.

(…)

Extrait de « Déluge d’Alqsâ » de Sofiane Meziani, éditions Les points sur les i

[1] https://www.middleeasteye.net/fr/actu-et-enquetes/guerre-israel-palestine-fausses-informations-crimes-hamas-7-octobre

[2] John J. Mearsheimer et Stephen M. Walt, Le lobby pro-israélien et la politique étrangère américaine, La découverte, 2009

[3] Coran 30, 22

[4] Malcom X dit plus exactement : « Les médias sont les entités les plus puissantes sur terre. Ils ont le pouvoir de rendre les innocents coupables et de faire des coupables des innocents. Et c’est ça le pouvoir. Parce qu’ils contrôlent l’esprit des masses. » Retranscription d’un discours de 1963 citée dans Redefining Black Power : Reflections on the State of Black America, édité sous la direction de Joanne Griffith_

[5] Coran 2, 31

 

Author : Sofiane Meziani

Le dhikr : Le souvenir de Dieu, une révolution intérieure

« En vérité, c’est par le rappel de Dieu que les cœurs s’apaisent. »
(Coran, 13:28)

Dans le tumulte incessant du monde moderne, où l’esprit est saturé d’images, d’informations et de distractions, il devient de plus en plus difficile de faire silence. Nos pensées s’entrechoquent, nos émotions nous gouvernent, et nous sommes prisonniers d’un flux ininterrompu d’agitation mentale. Pourtant, au cœur de cette cacophonie, une voix intime murmure : le dhikr, le souvenir de Dieu.

Le dhikr n’est pas une simple répétition de formules, ni un rituel mécanique déconnecté du cœur. Il est un art, une discipline et surtout, une science de la présence. Il ne consiste pas à seulement prononcer des mots, mais à orienter toute l’âme vers l’Unique, à purifier l’esprit de ce qui l’encombre pour le recentrer sur l’essentiel. Il est une révolution intérieure, un acte de résistance contre l’oubli et l’aliénation du monde.

L’oubli de Dieu, l’oubli de soi

Le Coran nous met en garde contre une des plus grandes maladies du cœur : l’oubli de Dieu.

« Et ne soyez pas comme ceux qui ont oublié Dieu ; Il leur a fait alors oublier leurs propres âmes. »
(Coran, 59:19)

Ce verset est d’une profondeur vertigineuse. Il nous enseigne que l’éloignement de Dieu entraîne un éloignement de soi-même. Celui qui vit dans l’oubli du divin perd la connaissance de sa propre nature. Il devient étranger à lui-même, emporté par des désirs illusoires et une existence fragmentée. Il cherche à combler un vide intérieur par l’accumulation, la distraction, le bruit, mais ne trouve qu’une angoisse diffuse, une instabilité permanente.

À l’inverse, le dhikr est ce qui reconnecte l’homme à son être profond. Il est un acte de réappropriation de son âme, une réconciliation avec sa fitra, cette disposition originelle qui tend naturellement vers Dieu.

Le Prophète ﷺ a dit :
« La différence entre celui qui invoque son Seigneur et celui qui ne L’invoque pas est comme la différence entre le vivant et le mort. » (Rapporté par Boukhari et Muslim)

Le dhikr est ainsi une source de vie. Il ranime les cœurs asséchés, redonne souffle à l’âme et permet à la lumière divine d’éclairer l’intérieur de l’homme.

Le dhikr, une purification du cœur

L’homme est un être habité par le monde. Il accumule sur son cœur des impuretés subtiles, non pas de simples péchés visibles, mais surtout des attachements toxiques : l’orgueil, la jalousie, l’avidité, la rancune, l’excès de préoccupation pour la dunya.

Le Prophète ﷺ a dit :
« Il y a dans le cœur un morceau de chair : s’il est sain, tout le corps est sain, et s’il est corrompu, tout le corps est corrompu. Il s’agit du cœur. » (Rapporté par Boukhari et Muslim) Et comment purifier ce cœur ? Par le dhikr.

Le dhikr est un polissage. À l’image d’un miroir terni par la poussière, le cœur doit être régulièrement nettoyé pour refléter la lumière divine. Le Prophète ﷺ a dit : « Tout a un produit pour le nettoyer, et ce qui nettoie le cœur, c’est le souvenir de Dieu. » (Rapporté par Ibn Majah)

Le dhikr n’est pas qu’un moyen d’obtenir des récompenses. Il est une nécessité existentielle, une hygiène intérieure aussi indispensable que la respiration. C’est par lui que l’âme retrouve sa clarté et que le cœur peut à nouveau percevoir la Réalité divine.

Un rappel dans chaque souffle

Le dhikr authentique ne se limite pas à des instants de prière ou à des séances d’invocation formelles. Il est un état permanent, une présence continue du cœur à Dieu. Il se murmure dans les moments d’épreuve comme dans les instants de joie, dans le bruit comme dans le silence, dans l’agitation du quotidien comme dans la solitude contemplative.

Le Coran nous enseigne :
« Ô vous qui croyez ! Invoquez souvent le Nom de Dieu et glorifiez-Le matin et soir. » (Coran, 33:41-42) L’homme qui s’imprègne de dhikr ne devient pas un ascète coupé du monde, mais un être enraciné dans la conscience divine. Il agit, parle et vit avec une présence intérieure qui transfigure chacune de ses actions. Il n’est plus dispersé, mais unifié.

Les sages disent que le dhikr doit s’ancrer si profondément en nous qu’il accompagne chaque souffle, qu’il devienne une seconde nature. On rapporte qu’un disciple demanda un jour à un maître soufi : « Quelle est la meilleure manière de se rappeler de Dieu ? » Le maître répondit : « Oublier tout ce qui n’est pas Lui. »

L’ultime remède contre l’angoisse moderne

Le monde moderne est caractérisé par une anxiété diffuse, une instabilité intérieure qui pousse à rechercher des compensations artificielles : hyperconnexion, divertissements permanents, consommation effrénée. Nous avons tout ce dont nous avons besoin matériellement, mais nos âmes sont affamées.

Le Coran nous donne une clé simple mais puissante : « En vérité, c’est par le rappel de Dieu que les cœurs s’apaisent. » (Coran, 13:28)

L’homme qui vit dans le dhikr n’est pas ballotté par les vents du monde. Il trouve en Dieu un refuge, un ancrage, une stabilité intérieure inébranlable. Il traverse les épreuves avec sérénité, car son cœur est attaché à une réalité qui ne change pas. Le dhikr est l’antidote au vide existentiel. Il est la réponse au mal-être contemporain. Il est ce qui permet à l’âme de respirer dans un monde qui l’étouffe.

Le dhikr, un mode de vie

Il ne suffit pas de prononcer des mots pour que le cœur soit éveillé. Le véritable dhikr est celui qui s’accompagne d’une présence, d’un sens, d’une conscience de Celui que l’on évoque. Il est un état d’être, une manière d’habiter le monde sans jamais oublier l’essentiel. Le Ramadan nous apprend à jeûner avec le corps, le dhikr nous apprend à jeûner avec le cœur : jeûner du futile, du superflu, de tout ce qui nous éloigne de Dieu.

Et si le dhikr devient un compagnon de chaque instant, alors peu importe où l’on se trouve, nous sommes toujours « chez nous », car nous sommes avec Lui.

« Souvenez-vous de Moi, Je Me souviendrai de vous. » (Coran, 2:152)

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1 Commentaire

  1. Fatima

    MashaAllah. Quel beau rappel ❤️ La douceur et la grandeur de Dieu… Que Dieu apaise nos cœurs